La glace et les glaciers

(voir aussi mer polaire)

Les glaciers sont des masses de glace formées par accumulation de la neige, d'étendue variable et animées d'un lent mouvement qu'on trouve dans les montagnes élevées et dans les régions polaires. Actuellement, les glaciers couvrent environ 15 millions de km2, soit 11% des terres émergées. Quand on songe aux conséquences d'une telle extension sur les océans, les climats, la vie, on mesure tout l'intérêt scientifique et pratique de la glaciologie.

 

La glace

La glace est l'état solide de l'eau quand la température est égale ou inférieure à 0°C.

La glace sans impuretés est transparente et incolore. Elle cristallise dans un système hexagonal, comme le montrent les cristaux de neige en forme d'étoiles à six branches. La densité de la glace est de 0.92, de sorte qu'elle flotte sur l'eau liquide. Mais cette densité s'abaisse quand la glace contient des bulles d'air. Contrairement aux autres solides, la glace augmente de volume en se solidifiant, ce qui a d'importantes conséquences sur la fragmentation des roches fissurées.

La glace existe sous plusieurs formes dans la nature :

La neige

Lorsque l'air est à une température voisine ou inférieure à 0°C, la vapeur d'eau qu'il contient se condense sous forme de cristaux agglomérés en flocons de neige.

Le verglas

Lorsque l'eau atmosphérique est en état de surfusion, elle se congèle au contact des corps solides froids, qu'elle recouvre d'une mince couche de verglas.

Le givre

Le givre provient de la congélation des gouttelettes d'un brouillard froid sur les végétaux et les aspérités du sol.

La grêle

La grêle se forme de même dans l'atmosphère par congélation brusque de gouttes en surfusion, ou autour de petits flocons de neige ou de grains de poussière.

 

Au sol, l'eau libre se congèle différemment selon qu'elle est douce ou salée.

La densité de l'eau douce est maximale à la température de 4°C. Lorsque les molécules d'eau proches de la surface atteignent 4°C, elles s'enfoncent, créant ainsi un courant de convection jusqu'à ce que toute la masse d'eau soit à 4°C. A ce moment, si la température s'abaisse encore, apparaissent des cristaux de glace en suspension, puis des glaçons isolés qui se soudent en une masse unique. Selon son épaisseur, la glace peut supporter de lourdes charges :

 
- 5 cm : un homme adulte,
 
- 15 cm : une voiture,
 
- 30 cm : un camion.

Si, comme c'est le cas en Sibérie et dans le Canada du Nord, la fonte de la glace (débâcle) se produit sur les fleuves plus tôt en amont qu'en aval, la glace d'aval faisant barrage aux eaux d'amont peut provoquer d'immenses inondations.

L'eau de mer, salée, gèle à une température inférieure à celle du gel de l'eau douce : -2°C pour une salinité de 35 pour mille. Formée d'eau salée, la banquise est la mer prise par la glace suriceberg une grande étendue, plus ou moins disloquée et fragmentée (pack) en raison des courants et des marées. Formés d'eau douce, les icebergs sont d'énormes blocs de glace détachés des glaciers terrestres qui bordent les mers polaires. Un neuvième environ de leur masse totale est émergée. Ils fondent très lentement. Entraînés par les courants, ils peuvent atteindre des latitudes relativement basses. (voir mer polaire)

Les glaciers:

 

 

Formation et évolution des glaciers

Si la température reste inférieure à 0°C, la neige tombant sur le sol peut s'accumuler suivant la configuration du terrain, notamment là où elle reste à l'abri du vent. La neige fraîche contient beaucoup d'air et sa densité est très faible. Mais, sous la pression de sa propre masse, elle se tasse et se transforme en neige dure et granuleuse (névé), puis en glace d'abord bulleuse (bulles d'air), d'un blanc opaque, puis compact et d'une transparence bleutée. Ainsi se forme un glacier.

Entre la paroi rocheuse et le névé s'ouvre en général une profonde crevasse, la rimaye. C'est que la masse du glacier est animée d'un lent mouvement vers l'aval, dû à la pesanteur. Insensible à l'oeil nu, la vitesse varie selon la pente, la saison et les différents points du glacier. Elle peut atteindre de 50 à 800 m par an pour les glaciers des Alpes, jusqu'à 20 km pour l'Alaska.

En raison de l'incompressibilité de la glace, des crevasses s'ouvrent sur le glacier dès que la vitesse s'accélère, dans une étroiture ou sur une rupture de pente. Ces crevasses délimitent d'énormes blocs de glace, les séracs, dont le déséquilibre provoque parfois d'impressionnantes avalanches. La partie médiane et superficielle de la langue glaciaire avance plus vite que ses bords et sa base, ralentis par les frottements sur les parois du lit glaciaire. Cette différence de vitesse explique la forme convexe de la langue et du front qui termine le glacier en aval. Si l'alimentation en neige est insuffisante, le glacier peut fondre en épaisseur, diminuer de longueur, s'ensevelir sous les débris qu'il entraîne (glaciers "noirs", glaciers rocheux) ou même revenir à l'état de névé, puis disparaître. C'est ce que l'on observe aujourd'hui dans les Alpes, où le chalet du Montenvers, qui était lors de sa construction à peu près au niveau de la mer de Glace, est aujourd'hui à 300 m au-dessus ! Ces reculs d'érosion, permettent d'étudier la genèse du relief glaciaire qui affecte de nombreuses régions jadis occupées par les glaces.

 

 

Les différents glaciers

 

 

Dans les régions polaires, et notamment en Antarctique et au Groenland, les glaciers couvrent d'immenses territoires sous la forme de calottes glaciaires (inlandsis), épaisses de 2000 à 4000m, qui descendent jusqu'au niveau de la mer.

 

 

Dans les montagnes des climats tempérés, les névés ne se trouvent qu'entre 2700 et 3000m.

 

Les glaciers de montagne ne couvrent que 3% de la surface totale occupée par les glaces. Ils comprennent des glaciers de cirque, logés dans les creux du relief, des glaciers de plateau et des glaciers de vallée.

Dans les montagnes bien alimentées en neige, les langues glaciaires s'avancent dans les vallées et reçoivent, le cas échéant, des glaciers affluents. Suivant leur alimentation, les glaciers sont plus ou moins longs. Ceux de l'Himalaya peuvent atteindre une centaine de kilomètres, ceux des Alpes, moins de 20. Ils se terminent au-dessous de la limite des neiges permanentes, où la fusion et l'évaporation l'emportent sur l'alimentation. En Alaska, ils débordent même la montagne et se rejoignent pour former des glaciers de piémont.

 

Le modelé glaciaire

Les mouvements de la glace, combinés avec la pression exercée sur le fond, l'entraînement des débris et le travail des cours d'eau sous-glaciaires sont à l'origine d'une famille de formes et de formations particulières, qui constituent le modelé glaciaire.

L'eau infiltrée dans les fissures des roches, en gelant, les fait éclater (gélifraction) et prépare ainsi les matériaux qui seront emportés par le glacier. L'action de l'érosion glaciaire est inégale le long du lit, plus faible dans les zones de séracs que sous les biefs plus massifs. Ainsi se forme un chapelet d'ombilics surcreusés, séparés par des seuils, ou verrous.

Transversalement, le lit du glacier tend à prendre un profil en U. Si le glacier emplit toute la vallée, celle-ci se transforme en vallée en auge. Si le remplissage n'est que partiel, les versants en V de la vallée préglaciaire se raccordent à l'auge par des épaulements, et les vallées affluentes restent suspendues au-dessus de la vallée principale.

Agent d'érosion, le glacier est aussi un agent de transport des matériaux qu'il a arrachés ou reçus en cours de route. L'accumulation des matériaux forme les moraines. On distingue plusieurs type de moraines :

- les moraines latérales : sur les flancs du glacier ;
- les moraines médianes : formées au confluent de deux glaciers par la jonction de deux moraines latérales ;
- les moraines de fond : composées des débris entraînés par la glace et par les torrents sous-glaciaires ;
- les moraines frontales : en arc de cercle (vallums), accumulées à l'extrémité inférieure du glacier.

En aval du vallum, les torrents proglaciaires édifient, avec les matériaux des moraines, des cônes ou des glacis fluvioglaciaires.

Après le retrait des glaciers, les vallées présentent une succession de lacs (lac du Bourget, lac d'Annecy) ou de plaines de comblement (Grésivaudan) correspondant aux ombilics, et de gorges étroites creusées par les torrents sous et postglaciaires à travers les verrous.

Les fjords sont d'anciennes vallées glaciaires envahies par la mer. sous les champs de glace (icefields), les effets de l'érosion sont en général plus restreints : ils se bornent à un relief moutonné, aux roches polies ou striées, formé de collines arrondies et de cuvettes remplies par les eaux de fonte (lacs de Scandinavie et du Canada).

En amont des moraines frontales, il subsiste un paysage chaotique formé de lacs de surcreusement ou de barrage (lac Léman, les grands lacs américains), de lacs résiduels (culots de glace morte), de blocs erratiques et de collines allongées, érodées et polies (drumlins, abondants en Finlande), ou formées d'alluvions fluviatiles sous-glaciaires (oesar, dont le singulier est os).

 

Les glaciations

La glaciation est une période marquée par un large développement des glaciers, qui couvrent alors d'immenses régions. On en connaît plusieurs dans l'histoire de la Terre : au précambrien, au paléozoïque, à la fin du tertiaire et au quartenaire. Celles du quarternaire (Günz, Mindel, Riss, Würm, dans les Alpes) ont laissé de nombreuses formes de relief et de vastes moraines encore visibles dans le paysage.

Les glaciations sont séparées les unes des autres par des périodes de réchauffement, dites interglaciaires. Chaque glaciation commence par une phase d'expansion, suivie d'un maximum, puis d'un retrait. Ce retrait comporte en général des temps d'arrêt qui définissent des stades. Lors de leur plus grande extension, les glaciers ont recouvert une grande partie de l'Europe (jusqu'à Londres et, pour les Alpes, jusqu'à Lyon), de l'Amérique du Nord, de l'Asie septentrionale et de l'extrémité australe de l'Amérique du Sud, soit environ 55 millions de km2, contre quelque 15 millions aujourd'hui !

Sur les côtes, les périodes glaciaires sont marquées par des régressions marines, et les périodes interglaciaires, par des transgressions.

Sur la Terre, chaque nouvelle glaciation tend à effacer les traces de la précédente ; aussi les formes héritées des glaciations disparues datent-elles le plus souvent de la dernière glaciation (dite Würm dans les Alpes, Weichsel en Europe du Nord, Wisconsin en Amérique).

L'époque actuelle, postérieure à la dernière glaciation, est dite postglaciaire, ou holocène.

Sommaire